Comment l’enfant du passé reste-t-il présent en chacun de nous ? À quel point faut-il se contenter de l’adulte construit au fil des années, des expériences ? Le thème de l’enfance, transversal à plusieurs projets*, m’habite et m’interroge en permanence, cœur d’une sphère dans laquelle des idées s’agitent, s’entrechoquent et se multiplient. Ces questions trouvent résonance dans une lecture, un film, une remarque, pour enrichir la réflexion.
En ouverture de son roman Pas même le bruit d’un fleuve, Hélène Dorion intitule le premier chapitre d’une citation d’Alexandre Marc Oho Bambe (Prix Paul Verlaine de l'Académie française 2015) : « Vivre, c'est suivre les traces de l'enfant qu'on a été ». Dans Neverland, Timothée de Fombelle part à la recherche d’un texte symbolique, lui aussi sur les traces de l’enfance. Son livre - à la fois roman, poésie, autobiographie avec une pointe de surnaturel, permet au narrateur de porter un regard sur l’enfant, de le frôler, de le côtoyer. Jusqu’où ? Cette observation en retrait pourrait suffire, par les sensations qu’elle (lui) permet d’éprouver, les souvenirs convoqués. En lisant ce livre, j’ai éprouvé cette impression ambivalente qui oppose l’envie de retrouver l’enfant que nous étions, à celle de le laisser partir. Plus que « retrouver l’enfant en nous », il s’agit de se souvenir que cet enfant existe, d’admettre son côté révolu, autant que de lui conserver une place. « Ce n’est pas grave que je me ride », a dit Sophie Fontanel dans la Grande Librairie, […] « en revanche j’essaie de garder l’intérieur juvénile. ».